A un moment charnière où se met en place une nouvelle mandature gouvernementale, les Président-e-s et Directeurs-trices généraux-ales des organismes Hlm de la région ont souhaité, à l’occasion de l’assemblée générale statutaire de leur union régionale, présidée par Jean-Louis COTTIGNY, et en présence de Jean-Luc VIDON, Président de la FNAR, échanger avec Frédéric LETURQUE, Président de la Communauté Urbaine d’Arras et Président de l’Association des maires du Pas de Calais sur leurs visions des conditions pour réussir le pari de la Ville Bas Carbone.
En premier lieu, et derrière le nouveau défi de la Ville Bas Carbone, tous y inscrivent un même objectif concret et prioritaire : celui d’améliorer la vie des habitants, sur le plan du logement mais pas seulement. En effet, en région Hauts-de-France, les ménages sont encore très nombreux à vivre dans des logements énergivores et inconfortables (120 000 à 170 000 logements sociaux seraient en étiquettes énergétiques E, F ou G) dans un contexte où les charges énergétiques tendent à devenir financièrement insupportables pour leurs occupants, au vu de l’envolée des prix de l’énergie.
Par ailleurs, si la vertu des ambitieux projets de renouvellement urbain conduits en région est de permettre la transformation en profondeur de nombreux quartiers, ils ont parfois comme effet pervers d’exclure des investissements de court terme d’autres patrimoines sur lesquelles s’imposent désormais des rénovations lourdes devenues très urgentes.
« Des investissements colossaux doivent être à présent conduits rapidement, pour lesquels aucune concession n’est désormais possible. » Frédéric LETURQUE
Mais au-delà du logement, et pour répondre à la colère, aux inquiétudes et au mécontentement que traduit la carte régionale des résultats électoraux, les participants se sont surtout accordés sur l’enjeu à proposer, au-delà d’un toit, de vrais projets de vie aux ménages. Cette ambition passe par une nécessaire approche globale articulant le logement, l’emploi et la mobilité.
Ainsi, si la production neuve est un enjeu important en région, dans un contexte contraignant de sobriété foncière, c’est bien sur la remise en état du parc ancien qu’il s’agit, pour tous, de prioriser les efforts d’investissement sur les territoires.
C’est une vraie vision du logement social que les bailleurs sociaux avec le représentant des élus locaux ont partagé lors de ce temps régional d’échanges qui a permis de rappeler l’importance du rôle des bailleurs
« Vous n’êtes pas des entreprises comme les autres, l’Etat ne doit pas vous voir comme un acteur économique classique ; les opérateurs privés ne peuvent pas faire ce que vous faites, et il faut le rappeler avec une voix forte ». Frédéric LETURQUE.
Au-delà de partager sa vision du rôle du logement social sur les territoires, Frédéric LETURQUE a également suggéré et partagé la méthode qui, de son point de vue, conditionne la réussite de la trajectoire Bas Carbone souhaitée.
– Être dans la réalité des gens qui habitent sur les territoires et poser la problématique de manière globale,
– Mettre chacun en responsabilités d’une voix forte et agir très vite ; chacun des acteurs ne peut réussir à traiter seul ; les collectivités et les bailleurs doivent continuer à avoir les moyens de conduire les politiques urbaines et sociales qu’elles ont la responsabilité des de conduire,
– Accepter de conduire des politiques différenciées d’un territoire à l’autre, tous les territoires n’ont pas le même rythme de développement, d’innovation, de maturité sur leurs politiques publiques.
– Développer les solidarités entre les bailleurs et renforcer celles qui existent déjà entre bailleurs et collectivités,
– Réinventer la planification face à l’enjeu d’accélération de la massification,
– Et enfin se saisir de ce que permet la loi 3DS en termes de simplification et de droit à la différenciation.
Plusieurs témoignages de directeurs d’organismes de la région sont venus illustrer plusieurs axes de la méthode exposée :
Pierre TONNEAU, directeur général de SIGH a confirmé que la mise en place de la RLS avait profondément contrarié les stratégies d’investissement des bailleurs et imposait des arbitrages patrimoniaux qui se sont fait au détriment de la production neuve. Sur la Communauté Urbaine d’Arras, la définition de cette nouvelle stratégie patrimoniale visant à l’éradication des passoires thermiques pour 2024 a été définie de façon concertée avec la collectivité.
David QUINT, directeur général d’Amsom Habitat, engagé dans un vaste plan de rénovation énergétique de son patrimoine, a rappelé qu’un cadre règlementaire et financier stabilisé et cohérent était une condition nécessaire à la conduite accélérée des projets de rénovation énergétique. Il permettrait aux opérateurs d’inscrire leurs actions dans un cadre de planification opérationnelle qui permet la massification.
Jean-François CAMPION, directeur général de Maisons et Cités, illustre la contribution de la maîtrise d’ouvrage sociale à l’émergence de nouvelles filières économiques régionales et insiste sur l’enjeu à ce que les relais soient assurés par les collectivités, dont la Région, pour permettre à ces filières de se développer durablement.
Joseph MATRAJA, directeur du patrimoine et de la maitrise d’ouvrage de Pas de Calais Habitat, a également illustré la capacité d’un bailleur, en collaboration étroite avec une collectivité, à transformer un patrimoine individuel à vocation très sociale pour l’adapter aux modes d’habiter actuels.
Enfin, Efraïm BALCI, directeur général de Clésence, a illustré, au travers de la présentation de l’extension du Foyer NOBEL à Arras, les vertus de la coopération entre les bailleurs, les collectivités, les acteurs associatifs du territoire pour adapter et développer une offre de logement pour jeunes, dans un contexte de montage juridique et financier complexe.
Et enfin, Jean-Luc VIDON, Président de la FNAR, et Jean-Louis COTTIGNY, Président de l’URH, en écho aux échanges nourris entre les membres de l’Assemblée ont conclu sur trois enjeux essentiels pour le mouvement régional :
– Réaffirmer avec vigueur, qu’au-delà de notre rôle économique, les bailleurs sont avant tout des acteurs sociaux qui assurent un rôle d’intérêt général au service de la cohésion sociale sur les territoires. Ils sont aux côtés des collectivités et des acteurs de l’emploi et de la formation.
– Il est essentiel de porter les efforts collectifs sur l’amélioration du parc de logements existants, là où vivent les gens. En ce sens, le développement de la production apparaît résiduel par rapport à cet objectif.
– Nous avons une parole forte à porter auprès des représentants des élus et auprès de nos prochains parlementaires pour que les erreurs de la précédente mandature ne se reproduisent pas.